La qualité d’auteur ====================== * Jonathan L. Meakins * James P. Waddell Tous les grands journaux biomédicaux revoient leurs critères régissant la qualité d’auteur. Dans notre journal, les Directives aux auteurs présentent un grand nombre des enjeux rattachés aux directives que publie le Groupe de Vancouver (le Comité international des rédacteurs de revues médicales) dans ses «Exigences uniformes pour les manuscrits présentés aux revues biomédicales» (disponible à l’adresse **cma.ca** à la rubrique Nos publications, *Journal canadien de chirurgie*, Directives aux auteurs, Préparation des manuscrits)1. La question a déjà été abordée dans le Mot de la rédaction, particulièrement dans le numéro de décembre 2001, qui portait sur les publications en double ou frauduleuses2, et dans celui de février 2002, qui traitait de l’examen par les pairs3. La publication en double des mêmes données dans des journaux critiqués par des pairs est clairement inacceptable. En outre, les données frauduleuses, la manipulation indue des données ou la fabrication de données sont totalement inappropriées. Des règles rigoureuses1 régissent aussi la publication secondaire. Dans ce Mot de la rédaction, nous traitons des autres rôles et responsabilités de l’auteur. Dans certaines cultures, on utilise l’expression «signer une communication» pour indiquer la responsabilité que les signataires (c.-à-d. les auteurs) acceptent à l’égard de la publication. Cette signature se compare, dans toute circonstance administrative, à l’approbation d’un document, financier ou autre, qui indique que les auteurs connaissent la matière en question et en acceptent la responsabilité. De plus en plus, certains journaux médicaux demandent que l’on précise la contribution apportée par chaque auteur à la rédaction d’un manuscrit; d’autres, comme *The Lancet* et le *Journal de l’Association médicale canadienne*, définissent clairement les rôles et les responsabilités de chaque auteur à la fin du manuscrit publié4. Pourquoi toutes ces histoires, pourrait-on se demander. Dans les milieux universitaires, l’expression «publier ou périr» peut constituer un mantra puissant. On a signalé à maintes reprises l’inflation évidente du nombre des auteurs, que l’on constate peut-être le plus clairement dans les sections des photographies des journaux chirurgicaux, où jusqu’à six auteurs peuvent recevoir le crédit d’une photo et d’un bref paragraphe. Dans ce contexte, il est presque impossible de définir le rôle de chaque auteur. Nous avons en fait de la difficulté à comprendre comment tellement d’entre eux osent en revendiquer le crédit. La qualité d’auteur gratuite est un phénomène courant que l’on exprime par l’expression rédaction anonyme. Certains chefs de département peuvent considérer la qualité d’auteur gratuite comme leur droit inaliénable d’approuver tous les manuscrits émanant de leur département ou division, ce qui est inapproprié sur le plan de l’intégrité intellectuelle. On associe aussi une telle qualité d’auteur au recrutement de patients et l’on considère parfois que c’est le prix à payer pour faciliter ou appuyer une étude contrôlée randomisée ou par observation. La qualité d’auteur accordée gratuitement n’est pas tolérée sans contribution intellectuelle réelle à l’étude ou au manuscrit, ou contribution à la gestion des données, à la rédaction ou à la conception. Les comités de la permanence et des promotions des universités ont contribué à certains égards à l’inflation du nombre des auteurs à cause de l’obligation de «publier ou périr». Au moins deux universités ont abordé la question de façon différente. À l’Université de Toronto, il faut définir ainsi le rôle d’un auteur dans chaque publication: auteur principal, auteur secondaire, coauteur ou collaborateur. L’auteur principal est celui qui a eu l’idée de l’étude, qui a recueilli les données et a rédigé le document. Pour les besoins du Département de chirurgie, l’auteur de l’idée aurait, selon cette définition, droit aussi au statut d’auteur secondaire. L’auteur secondaire serait, par exemple, un membre du personnel enseignant qui a rédigé une communication avec un résident ou un fellow, lequel aurait fait la majeure partie du travail pratique. La qualité de co-auteur désigne le cas où deux auteurs ont contribué également au contenu de la communication (p. ex., le présent Mot de la rédaction). On entend par collaborateur quelqu’un qui a apporté une contribution moindre à une communication, mais qui a fourni, examiné ou analysé des données et a au moins critiqué la publication avant sa présentation. À l’Université Harvard, pour être promu professeur agrégé, il faut présenter, outre un curriculum vitae, ses cinq meilleures communications et l’on attribue la promotion en fonction des cinq documents en question. Pour promouvoir un enseignant au poste de professeur titulaire, on utilise de la même façon ses dix meilleures communications. Cette technique permet de contourner le nombre des communications en faveur de leur importance par leur contenu ou par le journal où elles sont publiées. La qualité du travail devient le critère le plus important, ce qui évite la stratégie, si courante maintenant, de la recherche fondée sur «l’éminçage» ou l’unité minimale publiable. Dans ses «Exigences uniformes pour les manuscrits présentés aux revues biomédicales», le Groupe de Vancouver a défini ainsi les responsabilités des auteurs: > **Qualité d’auteur** > > Toutes les personnes nommées à titre d’auteur doivent posséder la qualité d’auteur. De même, il faut nommer toutes les personnes possédant la qualité d’auteur. Chaque auteur doit avoir participé suffisamment au travail pour être en mesure de se porter garant de portions pertinentes du contenu. Un ou des auteurs doivent pouvoir se porter garants de l’intégrité de l’ouvrage dans son ensemble, de la conception à la publication de l’article. > > La qualité d’auteur doit être fondée uniquement sur les éléments suivants: 1) contribution importante à la conception de l’étude ou à l’obtention des données ou à l’analyse et l’interprétation des données, 2) rédaction de l’article ou révision critique d’un contenu intellectuel important et 3) approbation finale de la version à publier. Il faut respecter ces trois conditions. L’obtention du financement, la collecte de données ou la supervision du groupe de recherche ne justifient pas en soi la qualité d’auteur. > > Les rédacteurs peuvent demander aux auteurs de décrire la contribution de chacun et peuvent publier ces renseignements. > > Il arrive de plus en plus fréquemment que des essais multicentres soient attribués à une entreprise en qualité d’auteur. Tous les membres du groupe qui sont nommés en tant qu’auteurs, soit en cette qualité sous le titre, soit dans une note en bas de page, doivent satisfaire aux critères ci-dessus. Les membres du groupe qui ne répondent pas à ces critères doivent être nommés, avec leur permission, dans les remerciements (voir cette rubrique) ou en annexe. > > L’ordre de présentation des auteurs doit être une décision commune des intéressés. Comme l’ordre est établi de différentes façons, on ne peut en tirer de conclusions exactes sur sa signification, sauf lorsque les auteurs l’indiquent. Les auteurs voudront peut-être expliquer l’ordre de présentation dans une note en bas de page. Les auteurs devraient savoir que beaucoup de revues limitent le nombre d’auteurs indiqués dans la table des matières et que la NLM indique 25 auteurs dans le MEDLINE (elle en indique 24 et le dernier s’il y en a plus de 25). Comme corédacteurs du *Journal canadien de chirurgie*, l’opinion de nos lecteurs sur ces questions nous intéresse. Le concept qui sous-tend la désignation attribuée par l’Université de Toronto à ses auteurs nous semble en fait approprié. Nous avons toutefois tendance à accepter les définitions du Groupe de Vancouver et à réduire par conséquent le nombre d’auteurs anonymes ou honoraires en demandant qu’on définisse le rôle de tous les auteurs dans le cas de chaque manuscrit présenté pour publication possible. Nous attendons avec impatience les réponses de nos lecteurs, que nous publierons dans des numéros à venir. ## Références 1. Comité international des rédacteurs de revues médicales. Exigences uniformes pour les manuscrits présentés aux revues biomédicales. Mise à jour: octobre 2001. Disponible: [www.icmje.org](http://www.icmje.org) (consulté le 13 février 2002). 2. Meakins JL. Publications en double ou frauduleuses [éditorial]. Can J Surg 2001;44:405–6. 3. Waddell JP. Examen par les pairs [éditorial]. Can J Surg 2002;45:4–5. 4. Hoey J. Who wrote this paper anyway? The new Vancouver Group statement refines the definition of authorship [commentaire]. CMAJ 2000;163:716–7. [FREE Full Text](http://canjsurg.ca/lookup/ijlink/YTozOntzOjQ6InBhdGgiO3M6MTQ6Ii9sb29rdXAvaWpsaW5rIjtzOjU6InF1ZXJ5IjthOjQ6e3M6ODoibGlua1R5cGUiO3M6NDoiRlVMTCI7czoxMToiam91cm5hbENvZGUiO3M6NDoiY21haiI7czo1OiJyZXNpZCI7czo5OiIxNjMvNi83MTYiO3M6NDoiYXRvbSI7czoxNzoiL2Nqcy80NS8yLzg2LmF0b20iO31zOjg6ImZyYWdtZW50IjtzOjA6IiI7fQ==)