Le système de santé du Canada n’est pas universel ===================================================== * Edward J. Harvey Notre système de santé s’est retrouvé dans la mire des médias américains en mars. Et malheureusement, ce n’était pas parce que le nouveau gouvernement démocrate de Barack Obama allait adopter certaines des idées et des principes de notre soi-disant couverture médicale normalisée et homogène. Nous étions plutôt sous les feux de la rampe à cause de notre gestion des traumatismes nécessitant une intervention chirurgicale. L’actrice Natasha Richardson avait subi un traumatisme crânien apparemment mineur à la suite d’un accident de ski et était morte quelque part en transit entre la station de ski, un hôpital communautaire dans les Laurentides et un centre de traumatologie de Montréal. Son décès a suscité une indignation beaucoup plus véhémente chez les médias américains que canadiens. On a posé bien des questions pour savoir quelles étaient les circonstances de sa mort et qui était responsable. La véritable question est pourtant de savoir pourquoi les Canadiens n’ont pas semblé s’en préoccuper outre mesure. Partout au Canada, on constate des variances dans les soins médicaux dans de nombreuses spécialités. Or, rien n’illustre mieux l’amalgame disparate de nos soins de santé que les soins de traumatologie. Les traumatismes sont la première cause de mortalité des Canadiens de moins de 50 ans. C’est un lourd fardeau économique qui sape des milliards de dollars en productivité et entraîne, pour l’économie canadienne, une perte de revenu s’échelonnant sur plusieurs années. Il faut aussi savoir que les provinces n’accordent pas toutes la même importance aux traumatismes. Par exemple, le Québec est la seule région en Amérique du Nord à ne pas disposer d’un service d’hélicoptères-ambulances. L’argument des fonctionnaires du gouvernement a été et est encore que le rapport coûts–avantages d’un hélicoptère-ambulance n’est pas favorable. Ces mêmes fonctionnaires songent maintenant à réexaminer cette politique. Le *Journal canadien de chirurgie* (*JCC*) a signalé, dans une étude canadienne, que le transport par hélicoptère-ambulance de patients affichant un score d’indice de gravité de la blessure de 12 ou plus donnait des résultats nettement meilleurs pour les patients que le transport standard par ambulance1. Pourquoi faut-il qu’une actrice célèbre meure pour reconsidérer la question de savoir pourquoi nous n’avons pas, à l’échelle régionale, des politiques de soins de santé appropriées? Pourquoi la mort et la souffrance dans la population ne suffisent-elles pas pour modifier nos politiques? La réponse évidente dans ce cas de disparité des soins de santé comme dans d’autres, est que le problème n’est pas politiquement explosif. Jusqu’à ce qu’une élection soit gagnée ou perdue en raison d’insuffisances en matière de soins de santé, il continuera d’y avoir des sujets insignifiants dans le paysage politique. En tant que médecins, nous ne devons plus rester inactifs pendant que les politiques gouvernementales élaborées par des bureaucrates largement ignorants causent de telles lacunes dans les soins de santé. En ce qui concerne les politiques médicales, il semble que c’est celui qui parle le plus fort qui finit par se faire entendre, indépendamment des besoins. Les groupes de défense des droits des médecins et les associations provinciales ont besoin de parler plus fort lorsqu’ils prodiguent leurs conseils les plus pertinents aux bureaucrates. Et si on nous ignore, il faudra amener le débat dans la rue et le faire connaître directement à la population. Nous ne déterminerons peut-être pas l’issue d’une élection dans un proche avenir, mais nous pouvons espérer être assez bruyants pour montrer que nous avons toujours à cœur la santé des patients au Canada. ## Footnotes * **Intérêts concurrents:** aucuns déclarés. ## Référence 1. Mitchell AD, Tallon JM, Sealy B. Air versus ground transport of major trauma patients to a tertiary trauma centre: a provincewide comparison using TRISS analysis. Can J Surg 2007;50:129–33.