Aucun groupe n’a le droit d’ignorer un consensus d’opinion réfléchie.
Mollie Hunter (1922–2012)
Dans ce numéro, nous publions un rapport de consensus du Comité de pratique clinique de l’Association canadienne des chirurgiens généraux au sujet de Clostridium difficile1. L’usage médical du terme ≪ consensus ≫ a évolué au fil des siècles. Au 19e siècle, il signifiait ≪ harmonie entre les systèmes physiologiques ≫. Ce sens a disparu dans la plupart des domaines médicaux, à l’exception possible du domaine de la génétique, dans lequel un consensus peut faire référence à des séquences conservées d’ADN. Le sens physiologique précis a été remplacé en médecine par un sens populaire plus vague, souvent utilisé pour conférer une autorité à un énoncé ou un processus — autorité qu’il pourrait ne pas détenir autrement. L’usage populaire est dérivé du terme juridique consensus ad idem, notion issue du droit romain signifiant un ≪ contrat informel fondé sur le consentement mutuel ≫. L’élément de consentement a persisté dans son utilisation légale, mais le sens a changé dans l’usage populaire et médical pour désigner un accord non seulement entre les parties, mais une acceptation générale.
Bien que nous soyons devenus plus précis au sujet des degrés de qualité des preuves médicales, l’interprétation de ces unités de données dans les systèmes physiopathologiques complexes demeure moins structurée. Le résultat est souvent décidé davantage par les organismes de réglementation et les assureurs que par un accord entre les praticiens. Les National Institutes of Health (NIH) des États-Unis font une distinction entre les déclarations de consensus et les guides de pratique clinique (GPC), les définissant comme la synthèse de nouvelles informations issues de la recherche récente. Les politiques de normalisation par les administrations comme l’Union européenne sont vagues en ce qui concerne les méthodes d’élaboration d’un consensus, alors qu’elles sont normatives à l’égard des GPC, affirmant qu’ils peuvent être utilisés dans des litiges en tant que norme de pratique2. Cela est particulièrement vrai dans le cas des soins du cancer au Canada3. Le Programme d’élaboration de consensus des NIH tente de résoudre certaines de ces questions, mais le choix des sujets est très restrictif et l’approche par conférence est également restrictive4.
La méthode Delphi utilisée pour dégager un consensus tirerait son origine d’une méthode employée par les militaires après la Seconde Guerre mondiale. Ils tenaient des séances de remue-méninges sur les capacités et les actions futures de l’en-nemi. Développée plus tard pour la création de politiques publiques, la méthode Delphi a tenté d’inclure et de protéger tous les points de vue en utilisant des cycles itératifs pour préciser l’opinion consensuelle. Par ailleurs, la technique du groupe nominal attribue des aspects fondamentaux de problèmes complexes à des groupes en utilisant des techniques destinées à empêcher la domination par une seule opinion par un scrutin sur le choix des priorités. La technique du groupe nominal a été utilisée récemment pour déterminer les objectifs de temps d’attente pour la chirurgie pédiatrique au Canada5. La méthode Delphi est l’approche la plus souvent utilisée pour la communication à distance alors que la technique du groupe nominal est la préférée pour les conférences de consensus. Grâce aux systèmes de communication modernes, on peut combiner ces méthodes.
Le consensus ad idem suppose un accord non seulement sur la réponse, mais aussi sur la question. Le protocole JCC pour la publication d’articles fondés sur un consensus exige que les auteurs soient choisis par une société ou un groupe représentatif. Le sujet ou la question posée par l’énoncé doit être validé par un comité de ce groupe ou de cette société. La composition du rapport devrait utiliser les procédures décrites ici afin que les tâches de recherche soient réparties de manière productive entre les sous-groupes et que les opinions, y compris le point de vue du patient si possible, fassent l’objet de discussions. L’ébauche initiale du manuscrit devrait être distribuée à l’ensemble des membres de la société, dont les commentaires doivent être pris en compte dans les révisions avant la confirmation par un comité ou par l’Exécutif de la société commanditaire. Lorsque le manuscrit final est présenté au journal, il sera soumis à un examen indépendant par les pairs. Les articles acceptés pour publication incluront une note de bas de page confirmant la conformité au protocole du JCC pour l’élaboration d’un consensus. Au final, le poids accordé à un rapport de consensus dépendra de la validité du processus utilisé pour extraire l’opinion réfléchie qu’il évalue.
Footnotes
Intérêts concurrents: Aucuns déclarés.